Les voix du seigneur sont impénétrables ∣ ft. Anna d'Arendelle

Anna n'aurait pas su spontanément ce que c'était qu'un prêtre si elle n'avait pas été d'abord maudite avec une identité qui connaissait ce concept. Une histoire qui parlait d'une divinité de la sorte ressemblait davantage à l'un des contes qui parcouraient son monde qu'à une réalité. Mais puisque c'était ce en quoi il croyait et qu'elle avait vite compris qu'il y avait des choses, même éveillée, elle considérait que c'était une possibilité à ne pas écarter, du moins dans cette ville. De toute façon, cet homme ne lui avait jamais demandé de croire en quoi que ce soit. Il était simplement là.

Il y avait un certain nombre de personnes qui considéraient que c'était important de manifester de la charité envers les enfants de l'orphelinat. Il s'agissait d'offrir des jouets, des vêtements, de leur offrir des festivités de Noël plus confortables ou un gâteau d'anniversaire à la date de chacun des enfants du centre. C'étaient des choses que Anna avait toujours acceptées, tout en sachant pertinemment que ce n'était pas forcément le bien-être des enfants qui étaient en jeu à ce moment-là mais davantage à l'image que cela donnait des personnes concernées. Elle acceptait de jouer le jeu parce que c'était bénéfique pour les petits et qu'elles n'avaient pas un budget formidable pour pouvoir leur faire plaisir et prendre soin d'eux.

Mais elle savait que c'était différent pour le pasteur Schwartz. L’acte qu'il faisait en venant dans cet orphelinat était autant de charité que tous les autres, il s'agissait tout autant de venir en aide à des enfants dans le besoin. Mais cet homme était persuadé que c'était quelque chose d'important que de prendre soin de ses enfants. Il avait la même bienveillance que Anna et cela le lui rendait plus sympathique que quiconque. Elle l'accueillit donc avec un grand sourire. Elle avait remarqué qu'il était doué pour raconter des histoires et que les enfants attendaient souvent sa venue avec impatience.

« Pasteur Schwartz, cela faisait un moment qu'on ne vous avait pas vu. Les enfants vous réclament régulièrement », l'accueillit-elle avec un sourire jusqu'aux oreilles.

S’il y avait bien une chose que Anna se refusait à faire, c’était den vouloir à quelqu’un qui ne pouvait pas être disponible. Tout le monde avait une vie, lui comme les autres. Bon la vie d’Anna n’était pas forcément très captivante, enfin jusque là, mais elle avait retrouvé ses souvenirs, sa sœur et sa tante et c’était déjà énorme à ses yeux. Il se justifia en disant qu’il s’était passé beaucoup de choses et elle hocha la tête. C’était le moins qu’on puisse dire. Mais elle était curieuse de ce qui avait fait partie de la vie de son ami. Peu de personnes aurait considéré un pasteur venant faire acte de charité comme un ami, mais c’était le cas pour elle.

« Des choses intéressantes, je l’espère. Enfin, je suppose que tout, dans la vie d’un pasteur, doit sembler passionnant en ce qui vous concerne, mais vous ne pouvez sans-doute pas tout dire. On ne doit pas révéler les confidences des gens. Ca ne doit pas être toujours facile, d’ailleurs. D’entendre les confidences et d’y réagir de manière appropriée. C’est un vrai défi. »

Anna savait que les histoires du Pasteur pouvaient se répéter, les enfants en seraient toujours passionnés. Ils lui demandaient régulièrement de raconter à nouveau leurs histoires préférées, surtout les plus jeunes. C’était dans leur nature. Et il fallait avouer que la voix apaisante du Pasteur qui savait raconter les histoires avaient tout ce qu’il fallait pour les convaincre d’en écouter plus. C’était de cette façon qu’il transmettait ce qu’il voulait transmettre. Mais tant qu’il ne forçait pas les enfants à asséner que tout ce qu’il disait était la vérité, qu’il prêche ne la dérangeait pas plus que ça. Et puis, la religion pouvait apaiser certains enfants en mal de vivre.

« Des nouvelles ? Vous risquez de me donner envie de venir écouter aussi. »

Il lui demanda si elle s’était éveillée. Si elle avait toujours été Joanna, il était probable que non, elle n’aurait pas compris un traître mot de ce qu’il voulait dire par là. Mais puisqu’elle n’était pas cela, puisque le sort l’avait réveillée, elle comprenait sa question et pouvait y répondre assez facilement de manière positive. Cela faisait longtemps maintenant, au point que Joanna ne devenait plus qu’un vague souvenir. Elle n’avait pas tissé de liens assez fort, dépendant de cette personnalité là. Même sa meilleure amie avait ouvert grand les bras à celle qu’elle était redevenue. Elle n’était plus que Anna.

« Oui. J’ai même eu la chance de retrouver des membres de ma famille. J’en déduis que vous également ? »