Bonbon en gélatines, agression et cutie pie ft Will

Chantonnant et mâchonnant des oursons en gélatine, Omitrie attendait son train. Il bougeait beaucoup sur l’île pendant son temps libre, parce qu’il était incapable de rester plus d’une demi-heure en place. Il avait toujours été un enfant compliqué et à l’âge de ses cinq ans, le diagnostic était tombé, il était TDH et plus tard, on comprit qu’il était dyslexique, autant dire un mélange explosif. Mais heureusement, Omitrie était aussi un bon garçon. Et sa mère, lui offrait tout ce dont il avait besoin pour qu’il puisse apprendre dans les meilleures conditions possibles. Alors, il avait réussi à aller au lycée et aujourd’hui à l’université. Ce n’était pas toujours facile, mais il avait un suivi encore aujourd’hui et des médicaments, qui même s'ils ne pouvaient pas soigner son trouble, lui permettaient de pouvoir se concentrer plus longtemps. Mais, il y avait toujours cette envie, cette peur dans le fond, cette sensation qu’il ne devait pas rester trop longtemps au même endroit ou qu’on allait le retrouver. Mais qui allait le retrouver ? Il n’en savait rien, il ne lui était jamais rien arrivé de toute sa vie. Mais cette sensation, cette peur était toujours présente. Écouteurs dans les oreilles, il tapotait en rythme sa cuisse moulée dans son jean, alors que l’autre main continuait d’enfourner les bonbons entre ses lèvres.

Le blondinet avait dans l’esprit, une nouvelle chanson, il avait fait un rêve étrange. Un homme, enfin, une silhouette floue, coiffé d’une couronne d’os qui semblait l’appeler. Cela aurait pu être un cauchemar, mais… Quelque chose… Quelque chose l’attirait chez l’homme. Et il se sentait attiré par lui, il avait l’impression qu’il devait aller le prendre dans ses bras. Que l’homme à la couronne d’os ne lui voulait pas de mal, qu’au contraire il l’attendait. -”In the golden haze of summer's embrace, Underneath the sky's warm embrace, I saw a vision, a dream so bright, A figure dancing in the soft moonlight. Oh, stranger in my dream, With a crown of bones, a mystic theme, Your silhouette, a mystery so deep, In the realm of dreams, our secrets keep.” Hum, ça sonnait du bien. Il fallait qu’il s’en souvienne une fois chez lui et qu’il l’écrive. Oui, il demanderait peut-être de l’aide à Athénaïs ou à Phoebus pour le mettre sur papier… Avec sa dyslexie, mettre les bons mots et les bons sons, ce n’était pas simple. Il pourrait demander de l’aide à Elyan, mais non… Il faisait plus confiance à Athénaïs pour ce qui était de l’orthographe et de la grammaire. Mais Elyan lui avait promis une sortie surf et ils ne l’avaient toujours pas faite.

Perdu comme il l’était dans ses pensées, il ne vit pas les regards que lui lançait un petit groupe d’homme dans un coin de la gare. Il fallait dire que Omitrie pouvait attirer les convoitises avec sa guitare électrique sur le dos qui devait valoir de l’argent, son téléphone dernière génération. Alors certes sa tenue était des plus basique, mais rien qu’avec l’instrument et le téléphone, on pouvait se faire un peu d’argent. Et puis, le blondinet semblait être une proie facile.

Le groupe se rapprocha, l’instinct d’Omitrie, endormie comme ses souvenirs, ne se mit pas en branle et quand il releva son regard bleu, il tomba directement sur un homme au sourire inquiétant. Il recula, mais il cogna contre quelque chose de mou et de chaud. Un autre corps. Il était encerclé. L’homme devant lui lui retira ses écouteurs en même temps qu’il lui tira son téléphone des mains. -”C’est un beau téléphone ça. Je voulais me l’offrir”. Je peux regarder les options ?" Ses amis ricanèrent et Omitrie, perdu, se laissa faire un peu bêtement. Enfin, jusqu’à ce qu’on sente qu’on tirait sur sa guitare dans son dos. Il se retourna violemment. -”Hé non ! Vous allez me l’abimer !” Nouveaux ricanements. Et un coup de poings vient lui répondre, en plein dans le visage. La douleur irradia autour de son nez et il sentit du sang couler sur son visage. Il toussa un peu, quand il sentit du sang lui glisser dans la gorge, la fureur l’anima et il tenta de mettre un coup à celui qui lui avait cassé le nez. -”Doucement Pretty boy, tu vas te faire mal !”

Ce que je fiche à la gare? Non, j'ai pas encore prévu de quitter le pays, même si l'idée m'a plus d'une fois traversé l'esprit, mais sans parvenir à me faire passer le pas. Pourquoi? Certainement parce que Charlie et Rose ne me suivraient pas dans cette folie déjà. Et parce que c'est sans doute une folie, ensuite. Non, on a eu plusieurs plaintes concernant des vols à la tire à l'arrivée des trains, et les gars de la circulation sont débordés. Mes propres gars sont sur une affaire un peu plus haut placée dans les urgences. Donc je me suis décidé à oublier la paperasse pour ce soir et m'engager sur le terrain. En solo. Et sans arme de service. Mauvais combo, je sais, mais j'ai une fois pris le parti d'emmener une bleusaille avec moi pour avoir un soutien. Et j'ai fini par enfermer le gamin dans la voiture de patrouille avec interdiction d'en sortir tellement c'était une gêne de l'avoir dans les pieds.

Donc sur ce coup là, je suis en solo. Assis dans un coin du hall d'attente, capuche sur la tête, écouteurs non allumés dans les oreilles, faisant mine d'être passionné par la lecture d'un roman dont je n'ai même pas retenu le titre. Tout juste ai-je vérifié le tenir dans le sens de lecture, et tourner machinalement une page de temps en temps. Jusqu'à ce que la situation semble dégénérer suffisamment près de moi pour que je n'ai pas besoin de faire mine de ne pas m'y intéresser. Tout le monde ne regarde que ça.

Le temps que je me dirige vers le petit groupe et la bagarre a déjà commencé, alors je me contente de mettre une main sur l'épaule de celui qui me semble le plus virulent en groupe, le faisant se retourner d'instinct pour recevoir mon poing dans le visage. La seconde suivante, et c'est ma plaque qui s'affiche sous leur nez.

"Police. Un conseil, lâchez le gamin et barrez-vous."
"C'est moi ou t'es tout seul la flicaille?"
"Continue pour voir."

Du bluff? Totalement. Mais ça, il n'est pas censé le savoir. Et je préfèrerai qu'il évite de vouloir le vérifier. Le type que j'ai rétamé se relève en se tenant la mâchoire, semblant vouloir profiter de l'effet de groupe pour casser du flic, comme ils disent.

"Vas-y, j'pourrai porter plainte pour violences policières."
"Fais-moi plaisir. J'suis sur que le juge en tiendra compte. Maintenant vous foutez la paix au jeune, ou j'vous embarque?"

Règle numéro un, n'en perdre aucun de vue, et vu les regards et autres sourires qu'ils se lancent, j'ai assez bien fait d'appeler le poste et conserver l'appel actif sur mon portable juste avant de me lever. Non, je ne suis pas aussi imprudent qu'on le dit, pas quand le nouveau défi de la banlieue est justement de "casser du flic". D'ailleurs, ma vigilance n'est pas inutile non plus, vu le coup de poing que je bloque d'une main. Pour mieux en prendre un autre venant de l'autre coté. Je grimace avant de cracher du sang et en renvoyer un autre vers mon assaillant, qui tombe à terre dans le choc. L'instant suivant, je le retourne sur le sol pour le menotter dans le dos avant de me redresser pour observer ses copains qui nous encerclent toujours.

"Allez tirez vous. J'vous ai pas vus et vous m'avez pas vu. Et essayez de vous tenir à carreaux au moins pour aujourd'hui. Si j'vous revois trainer dans les parages, c'est le poste direct. Compris?"

Celui qui est au sol tente stupidement de s'en aller lui aussi, mais je l'arrête d'un pied placé dans son dos, avant de le relever pour l'asseoir sur un siège, ayant droit à me faire cracher au visage en passant. Ma seconde paire de menottes me sert à l'attacher à une barre du siège avant que je ne récupère mon téléphone dans ma poche.

"Tu peux m'envoyer deux agents à la gare? J'ai laissé un cadeau. Et tu diras à Red de récupérer les bandes des caméras de surveillance de la dernière demi-heure. Et à Jackson que si mes méthodes le dérangent, il a qu'à me rendre mon flingue."

Je raccroche sans attendre de réponse, glissant une main sur mon visage pour vérifier la présence de sang ou non avant de m'intéresser au jeune qui se faisait malmener.

"Salut gamin. Pas trop abimé?"

Je retire ma capuche de mon crâne et mes écouteurs de mes oreilles avant de m'installer à coté de lui.

"Lieutenant Atkinson. Appelle moi Will."