The courage to change ♚ Kovu

La journée avait très mal commencé, et ma patience commençait doucement à s’amenuiser. Déjà il y avait la circulation, aujourd’hui je ne savais pas pourquoi tout le monde avait décidé de prendre sa voiture, ensuite il y avait ma nouvelle cliente, j’avais été commis d’office sur le dossier et autant dire que si j’avais encore eu la possibilité de sortir mes griffes je l’aurais fait volontiers. Pas à cause de la cliente, non, elle la pauvre n’y était pour rien, mais plutôt concernant l’espèce de déchet de l’humanité contre qui elle osait porter plainte. Heureusement pour moi, j’étais une professionnelle et je savais garder mon calme en toute circonstance, mais cela m’avait également rappelé un souvenir douloureux. Et parce que je savais pertinemment que ce jour-là, s’il n’y avait pas eu Simba, si nous ne nous étions pas battus pour notre terre, Scar n’aurait probablement pas hésité à recommencer. Et de ce qu’elle m’en avait dit, son ex compagnon et mon ex beau frère étaient tous les deux à ranger dans la même catégorie celle des pervers narcissique.

Ma journée ne s’arrêtait cependant pas là, même si je l’avais voulu ça n’aurait pas pu être le cas puisque je n’avais pas qu’un seul et unique dossier à traiter. L’une des petites compagnies de la ville dont j’étais l’avocate avait un problème avec un des géants de Baiame. Généralement, j’adorais ce genre de dossier, ils nécessitaient de mettre en œuvre toutes mes capacités, et permettait de montrer aux gros bonnets de cette ville que mon surnom n’était pas démérité bien au contraire. Mais là, ça m’avait malheureusement encore plus énervée, puisque moi j'appelle ça du sabotage tout simplement. L’une des raisons pour lesquelles je m’intéressais aux lois encadrant les réseaux sociaux et les partenariats avec influenceur était devant moi. Sous prétexte qu’ils avaient de l’argent et un service marketing peu scrupuleux, ils avaient demandé à une célébrité locale de faire la promotion de leurs produits, tout en utilisant la diffamation vis à vis des produits concurrents à savoir ceux de mes clients. Le jeune homme sur la vidéo ne s’était sans doute pas posé de question, trop content d’avoir un partenariat pouvant lui ramener plus de visibilités

- Qu’ils le veuillent ou non, c’est de la diffamation et nous pouvons parfaitement les attaquer pour cela. Probablement ont-ils tout un service juridique, mais vous m’avez moi. Et je suis du genre tenace, je veux toutes les informations concernant la campagne de lancement de vos produits, ainsi que tout ce qui pourrait être utile, je vous ai fait une liste. Avec suffisamment de preuves, croyez bien que je ne suis pas prête de les lâcher.

J’allais devoir trier par ordre de priorité, mais avant de revenir au cabinet, je comptais m’arrêter dans un café pour manger et travailler un peu. Si je pouvais m’avancer sur ma pause de midi, j’aurais moins à faire cette après-midi. Déjà, j’allais envoyer un mail à Angélie pour l’affaire de violence conjugale. Il faudrait aussi que je prévienne l'assistante sociale, et qu’on convienne d’un rendez-vous toutes les trois pour voir comment avancer sur ce dossier. Sur ce genre d’affaires, je n’étais jamais seule, déjà c’était pour le bien de la victime, un suivi devrait toujours être fait selon moi, malheureusement ce n’était pas toujours le cas, et si l’association avait demandé un suivi psychologique, un suivi social ne serait pas de trop.

Vu l’après-midi qui m’attendait, je supposais qu' une dose de sucre ne me ferait pas de mal, je commandais une boîte de pâtisseries, je pourrais en donner à mon assistante. Elle le méritait bien pour organiser à ce point mes rendez-vous et mon planning, sans parler des potentiels clients qui se voyaient refusés et décidaient de la pourrir pour rien. Généralement, je lui demandais de me transférer les appels lorsque ça se passait de cette façon, j’avais remarqué que étrangement lorsque je m’emmêlais ils n’avaient plus du tout la même hargne.

J’aurais bien aimé profité du temps, si Mars était un mois plutôt instable, il faisait actuellement plutôt beau et les températures étaient agréables. Mais j’avais du travail et il était grand temps que je m’y remette, en revanche a peine arrivé au cabinet, je ne m’attendais pas à entendre des cris :

- Est-ce que je peux savoir ce qu’il se passe ici ?

“Ah maitre King, vous êtes de retour. J’essayais de faire comprendre à ce jeune homme, que sans rendez-vous, il ne pouvait pas vous voir.”

Je comprenais la logique de mon assistante, après tout c’était celle que j’avais imposée, mais bon aujourd’hui je n’étais vraiment plus à ça près. Et qui sait peut-être que cela pourrait un peu égayer cette journée qui avait mal commencé.

- En temps normal, je suis d’accord avec toi. Mais étant donné qu’il a fait tout ce chemin, autant écouter ce qu’il veut. Ne t’inquiète pas, je m’occupe de tout. Et tant qu'à faire, prend un roulée à la cannelle, je sais que tu adores ça, et c’est ma manière de te remercier pour tout le travail que tu fais au quotidien.  

Je fait signe au jeune homme de me suivre dans mon bureau, nous y serions plus à l’aise pour discuter.

- Désolée pour tout à l’heure, Malya ne faisait qu’appliquer les règles. Certains clients potentiels ont du mal à comprendre les limites. Alors, quelles sont les raisons de ta présence ici aujourd’hui ?

Autant ne pas perdre de temps et entrer directement dans le vif du sujet, je poussais également la boîte de pâtisserie dans sa direction, l’invitant à en prendre une. Elles n’allaient pas le mordre, et autant en faire profiter tout le monde.

   

Bon, effectivement cela n’allait pas être de la tarte, plus j’écoutais Kovu parler et plus la complexité de la situation m’apparaissait. Cependant, complexe ne voulait pas dire impossible, et pour moi le plus gros du travail avait été effectué, à savoir la remise en question. Sans remise en question, je ne pouvais pas travailler correctement et sachant que c’était Kiara qui avait parlé de moi, j’estimais que ce serait en quelque sorte lui rendre service que de m’occuper de cette affaire. J’avais déjà commencé à prendre mes notes sur mon pc, ouvrant d’office un nouveau dossier au nom de “Kovu”, si le nom avait une sonorité familière je préférais cependant garder cette remarque pour moi. Je n’étais après tout pas là pour rechercher les origines des prénoms de mes clients, mais pour les aider dans tout ce qui pouvait concerner les démêlés avec la justice.

- Je ne vais pas mentir, ça ne va pas être facile. Je suis prête à prendre cette affaire en charge à titre gracieux, ce sera un service que je rend à Kiara. Néanmoins, il va falloir s’accrocher car elle ne se résoudra pas en 5 minutes. Si vous êtes prêt à aller au bout, je le suis également.

J’avais volontairement changé mon ton, passant du “tu” au “vous” afin de bien montrer qu’il était un client potentiel et que je le prenais au sérieux. En milieu professionnel, je ne tutoyais pas mes clients, hors mon cabinet était justement un milieu que je considérais comme étant professionnel. Quitter un gang, ne se ferait pas comme ça en claquant des doigts et il en allait également de la sécurité de mon client, c’est pourquoi j’allais devoir faire intervenir les forces de l’ordre. S’il fallait prendre un rendez-vous pour un entretien avec la commissaire afin de mettre les choses en place je le ferais, mais techniquement je n’en aurais pas besoin. Un simple agent de police pourrait parfaitement servir de coordinateur et j’avais un certain nombre de contacts au sein du poste de police dû aux affaires sur lesquelles je me retrouvais commis d’office entre autres.  

- C’est un dossier sur lequel il risque d’y avoir plusieurs intervenants. Je suppose que vous ne connaissez pas la loi “RICO” ? C’est une loi fédérale des États Unis visant à lutter contre les gangs justement et qui prévoit des sanctions pénales pour tout acte de racket effectué par des organisations criminelles. Elle ne concerne généralement que les actes de racket en lien avec les entreprises comme par exemple l’extorsion de fonds. Si je la mentionne, c’est parce que vous serez forcément interrogé pour vos actes commis au sein de ce gang, je vais donc avoir besoin d’une liste la plus complète possible de vos actions commises en tant que membre de ce groupe pour monter ma défense. La police sera obligatoirement mêlé au dossier, l’intérêt de ma présence est de mettre en avant votre repentir, oui vous avez commis des actes criminels mais vous souhaitez changer, c’est ce qui vous évitera une peine lourde comme la prison. Il se peut qu’ils demandent l’intervention d’une assistante sociale, j’en connais une avec laquelle je travaille et j’ai tendance à la conseiller à tous mes clients, mais vous pouvez aussi en choisir une autre si vous le souhaitez.

Le but n’était pas non plus de tout lui imposer, je préférais simplement mettre les points sur les i d’entrée de jeu et lui expliquer ce qui allait se passer. Je pense que je n’avais pas besoin de lui parler des représailles qu’il risquait de subir en quittant son gang, il devait déjà être au courant cependant, l’intérêt d’avoir plusieurs personnes sur son dossier était aussi de faire en sorte que cela n’arrive pas. Il ne s’en tirerait pas sans rien aux yeux de la loi, mais plutôt que la prison, Kovu étant encore jeune et avec une famille à venir, je pourrais faire valoir des travaux d’intérêt général comme du bénévolat par exemple.

- Il y aura forcément sanction, cependant avec des éléments comme Kiara et votre enfant à venir, je peux plaider pour une peine plus douce qui vous permettra d’être présent pour eux. Il va falloir montrer que vous souhaitez vraiment changer, par des actions concrètes. De mon côté, je pensais à du bénévolat, cela permettrait de montrer à tous que votre passé de délinquant est derrière vous. Des questions ?

C’était un challenge qui m’attendait là, mais hors de question de baisser les bras et de me laisser démonter. Ce n’était pas le genre d’affaires qui pouvait m’effrayer et j’étais prête à m’investir à 200% sur ce dossier s’il le fallait. Alors je ne doutais pas qu’il y aurait des moments où ma seule envie serait de tout envoyer en l’air et d’avoir à disposition un sceau d’aspirine, cependant cela réveillait mon côté prédateur qui adorait ce genre de challenge. La lionne que j’avais été n’avait pas disparu, simplement au lieu de chasser, elle avait trouvé une autre activité sur laquelle se faire les dents.