You're a pain in my ass, but not the kind of pain I like ft John Hart

Se défouler, oublier, oublier. Oui, c'était le mot d’ordre de Jack. Quand l’agence du Tribunal des Variations Anachroniques était venu le chercher après la mort de Ianto, il n’avait posé aucunes questions, il avait accepté sans hésiter. Alors que dans son état normal, il se serait méfié, il savait de quoi étaient capables ce genre d’organisation. Il avait vécu l’enfer de Torchwood 3. Alors bon, il voulait bien être sympathique, mais il ne savait rien de cette organisation, ne connaissait pas ses collègues et en plus, il était passé de chef à simple soldat. Et il n’aimait pas tellement ça. Mais, il était là et il ne pouvait plus rentrer chez lui. De toute façon, chez lui, il ne savait pas où c’était. Il n’y avait plus rien ni personne qui l'attendait nulle part. Alors ici ou ailleurs, finalement, ce n'était pas si mal. Au moins, ce ne serait plus à lui de prendre des décisions et d’en assumer les conséquences. C’était un soulagement, il y avait trop de fantômes qui le suivaient déjà, pas la peine d’en ajouter plus. Son esprit n’était jamais au repos, depuis longtemps, des années, des centaines d’années, il dormait mal. Il ne dormait parfois pas du tout. Pendant quelque temps, quand il ouvrait les yeux, il y avait le corps chaud et calme de Ianto à ses côtés. Mais maintenant, il n’y avait plus personne, plus rien pour lui rappelait pourquoi il se battait.

Il se redressa et reprit son long blouson de l’armée qu’il avait gardé et qui était un peu sa signature. Il fallait qu’il s’occupe, qu’il se défoule, qu’il oublie.  Il pourrait descendre des bouteilles et savourer l’oublie éphémère que lui offrait l’éthanol. Mais il avait besoin de plus aujourd’hui. De se défouler, alors il pourrait entrer dans le premier bar qui lui passerait sous les yeux, choisir le type le plus costaud et l’insulter assez pour engager un combat. Mais il n’avait pas envie d’abimer son visage aujourd’hui. Alors, il avait cherché un petit moment avait de se souvenir qu’il avait entendu parler d’un stand de tir. Sans savoir qui en était responsable. Mais il s’en fichait, il ne voulait pas tailler un bout de gras. Juste, tirer sur des cibles et oublier à chacune des douilles qui tomberont à ces pieds un peu de ses problèmes. Oui, c’était utopiste comme idée, mais pour le moment, il n’avait pas trouvé mieux, alors à moins que les Daleks, les anges pleureurs et les Cyberman ne veulent envahir en une grande coalition la terre et qu’il puisse entrer en guerre totale, il n’avait pour le moment pas trouver mieux pour s’occuper. Ok, peut-être pas les trois factions en même temps… Quoique, au moins, ça l’occuperait un sacré moment ! Bon, c’était aussi l’arrêt de mort de toute vie, mais on n’avait pas tout ce qu’on voulait dans la vie. Et lui ce qu’il voulait… Bah, il n’avait jamais eu ce qu’il voulait, ce n’était pas aujourd’hui que ça allait commençait. Sauf si une boite bleue s’arrêtait devant lui, là, tout de suite, maintenant. Il attendit, une deux, trente secondes. Rien. Bon pas aujourd’hui. Il ne savait même pas si le Docteur était ici. Avec l’effondrement des multivers… Jack avait beau avoir réfléchi à la question, il n’avait aucune réponse.

De son pas déterminé, à grandes enjambées, son long blouson de l’armée volant dans son dos, il avait pris la direction du stand de tir. Il aurait pu prendre un taxi, mais il aimait respirer l’air de l’endroit où il était, s’imprégner de ses sons, de ses odeurs, de sa vie, pour mieux le comprendre, pour le connaître et être à même de le protéger si le besoin s’en faisait sentir. Et puis, on n’était pas à l'abri d’une agréable rencontre au détour d’une rue… Déprimé certes, mais pas abstinent le Harkness. Il ne fallait pas déconner non plus. Chute du multivers, effondrement des mondes, ok, mais Jack abstinent ? Et puis quoi encore ? Le Docteur habillé d’un tutu rose en train de danser un tango avec un dalek ? Impossible. Quoi queil donnerait tout pour revoir le docteur danser. Haaa, ce n’était pas le moment de penser à ça.

De ses grandes enjambées, il ne lui fallut pas si longtemps que ça pour arrivée à destination. Le bâtiment ne payait pas de mine, mais il entra, comme partout, en conquérant, un sourire sur le visage, son regard bleu prêt à séduire et à se laisser séduire. Son grand sourire, il avança pour prendre des renseignements et avoir le droit d’utiliser les armes. On n’allait pas lui refuser pas vrai ? Il s’approcha, le torse bombé vers l’accueil, pour payer sûrement. Personne, il fronça le nez, il était pressé de se défouler. Il se pencha un peu par-dessus le comptoir. -”Hum… Il y a quelqu’un ?” Son regard bleu scanna ce qu’il pouvait voir, mais pas de mouvement et il entendait d'ici le bruit caractéristique des armes à feu. Et bien, il n’avait plus qu’à attendre alors. Il s’accouda au comptoir, le regard fixé sur un point flou entre le mur et lui.

La dernière fois que je me suis servi de mon arme a été un fiasco complet. Je suis bon tireur, de ça, il n'y a aucun doute à avoir, et je refuse de penser que le cuir de n'importe quel animal puisse être assez épais pour qu'une balle ne passe pas à travers. Même si on parle d'un foutu dinosaure. C'est sur cette pensée que je vide mon chargeur sur un cible fixe au fond de la salle de tir dont je suis l'heureux propriétaire. Remarquant avec plaisir que ma main est si sure que les balles suivent suffisamment la même trajectoire pour ne faire qu'un trou élargi dans la plaque. De quoi me tirer un demi sourire satisfait alors que je retire mon casque anti-bruit de ma tête en vue d'aller chercher de nouvelles munitions.
C'est là que mon ouïe intercepte une voix venant de l'entrée du bâtiment, une voix que je n'ai pas entendu depuis si longtemps que je pense d'abord avoir été pris d'une hallucination. Mon regard clair se porte d'abord sur l'arme bien réelle dans ma main, un coup d'œil me permettant de m'assurer, dans ce monde étrange où nous évoluons présentement, que je suis bien réveillé, avant de se perdre dans la direction d'où cette voix s'est élevée.

Je range mon pistolet dans son étui fixé à ma hanche, décidant finalement de changer d'avis et de passer par l'armurerie pour aller y chercher des munitions comme c'était prévu au début, sentant qu'il se pourrait que j'en ai l'utilité. C'est donc en rechargeant le chargeur de mon arme, balle après balle, que je me pointe derrière le comptoir de l'établissement.

"Capitaine Jack Harkness. Ou quel que soit le nom que tu t'es choisi depuis. Il y avait longtemps."

Si ma voix est détachée, donnant presque l'impression que je me fous totalement de l'homme qui me fait face ici et maintenant, il est certain qu'il me connait bien assez pour savoir lire dans mon regard tout ce qu'il a à y lire. Oui, je suis heureux de le revoir, autant que je sais que cette rencontre a de grandes chances de mal se finir, je le désire à un point fou, mais j'ai pris garde d'avoir une arme chargée à portée de main. Lui et moi, c'est un tel nombre de paradoxes entremêlés qu'il est fatalement risqué pour ce monde que nous soyons réunis. Et pourtant, à présent qu'il est là, devant moi, il y a de fortes chances que je ne le laisse pas repartir.

Jack commençait à trouver le temps en sa seule compagnie un peu long. Il n’est pas un bon compagnon pour lui-même. Il le savait, pas sobre du moins, quoiqu'ivre, c'est peut-être pire. Enfin pire… Tout était relatif. Ses longs doigts se mirent à pianoter sur le comptoir, il voulait se défouler. Par rester seul avec ces pensées,  cela allait à l'encontre du projet qu'il s'était fixé. Il ferma les yeux, une seconde, deux secondes, vingt, trente secondes et une voix le sortit de sa torpeur. Cependant, cette voix, il ne pensait pas l'entendre de nouveau. D'étranges sentiments contradictoires le percutèrent de manière frontale. Il se redressa lentement, en une posture entre le combat, la fuite et… autre chose. Lui-même ne savait pas vraiment. Quoi ? Sauter au cou de l'homme qui venait de parler ? Ne soyez pas ridicule. Il glissa ses mains dans ses poches avant qu'enfin son regard bleu ne se pose dans celui de son vis-à-vis. -”Qu'est-ce que tu fais là ?” La dernière fois qu'ils avaient été ensemble. John avait provoqué la mort de deux membres de son équipe. Et ça… Jamais il ne pourrait le lui pardonner. Certes, il l'avait réunie avec son frère, mais ça n'effaçait rien de ce qu'il s'était passé. Il avait envie de lui mettre son poing dans la figure, mais il avait également vu qu'il était armé… Et n'étant plus immortel, il n'avait plus cet avantage sur John. Surtout sur John armé. Parce que s'il avait de nombreux défauts. Avec une arme, il valait dix hommes. Bon, lui n'était pas mauvais non plus, mais il devait avouer que la plupart des choses qu'il savait faire avec une arme à feu entre les mains, il le devait à John. Enfin, il ne voulait pas trop le lui avouer.

S'il avait su que c'était Hart le gérant du lieu, il ne serait pas venu. Dans sa poche, son poing se serra, sa mâchoire également. Son regard ancré dans celui de John, il fit semblant de ne pas voir ce qu'il se passait dans les yeux de l'autre ancien agent du temps. Il ne voulait pas avouer l'attirance. Parce que le reste, l'amertume, la colère et autre chose… La peur de voir en John l'homme que lui-même pourrait être, prenait toute la place. -”Tu sais quoi ? Je me suis trompé d'endroit.” Soit il partait. Soit… il n'en savait rien, mais il préférait ne pas rester pour avoir la réponse à cette question.

Il tourna le dos à John et bien déterminé à sortir, s'éloigna du comptoir sans rien dire de plus. Il espérait juste que s'il devait lui tirer dessus, alors il viserait un point non vital… Donc, pas la tête ou le cœur. L'épaule à la limite et la jambe si vraiment, il voulait le faire chier. Et l’immobiliser pour quelques jours voir semaines. Cependant, Jack avait bien conscience que tourner le dos à John était une connerie sans nom. Malgré tout, Jack le fit. Car il n'avait pas envie de lui faire face. Et puis, il n’était pas certain que l’île résisterait à leurs… Retrouvailles.  

C'est qu'il a l'air tendu comme un string, l'Apollon qui me fait face en priant tous ses saints pour pouvoir revenir deux minutes en arrière, avant qu'il n'ait franchi la porte de mon établissement. Je ne suis pas empathe, loin s'en faut, mais je sais exactement comment il fonctionne.

"Je pourrai fort bien te retourner la question."

Ses yeux accrochent les miens malgré lui, ou sont-ce les miens qui accrochent les siens malgré lui, tout ce que je sais, c'est que je ne vois bientôt plus autre chose de notre environnement que le bleu de ces prunelles dans lesquelles je me suis cent fois perdu. Jusqu'à ce que sa voix rejette tout en bloc. Nous rejette tout en bloc. En assurant qu'il n'aurait jamais dû mettre les pieds ici.
Et le voilà qui me tourne délibérément le dos pour se diriger vers la sortie. Pourquoi je le pense plus sérieux que les dix dernières fois où il a essayé de me jouer la même sérénade? Parce que je le connais. Assez pour savoir que cette fois-ci, il ne plaisante pas. Et que si je le laisse passer cette porte, il se passera peut-être dix ans avant qu'il ne laisse nos chemins se croiser de nouveau.
Ce qui me pousse à replacer le chargeur, plein, de mon arme avant de viser légèrement au dessus de son épaule, et tirer une balle qui va se ficher dans le mur devant lui.

"Non. Tu sais aussi bien que moi que l'univers est assez vaste pour qu'on ne s'y croise pas durant une décennie ou deux sans chercher à s'éviter. Si tu es entré ici aujourd'hui, ce n'est pas pour rien." Je réarme mon pistolet, décalant légèrement ma visée vers le bas. "Et tu sais également que je suis un excellent tireur. Mon prochain tir ne sera peut-être pas une semonce. Alors cesse de me tourner le dos comme un enfant boudeur et arrache le pensement une bonne fois pour toutes!"

Tout en parlant, je contourne l'obstacle que représente le comptoir pour me rapprocher de lui, offrant à son dos une moue plus subjective.

"A moins que tu ne veuilles qu'on saute l'étape "engueulade" pour aller directement à la réconciliation sur l'oreiller... ou le bureau, c'toi qui voit."

Bon allé Jack, offre moi un mini signe de vie. Parce que ton cul est peut-être magnifique, mais il n'est pas très expressif.

"Je pourrai fort bien te retourner la question." Jack haussa un sourcil, lui donnant un air surprit et sexy, de toute façon, il avait toujours l’air sexy avant de répondre d’un ton égale. -”Moi ? On est venu me proposer un poste pour protéger ce monde. Toi, je suppose que tel le rat que tu es, tu as senti l’effondrement des univers et tu es venu te réfugier dans une cave… ” Il lança un regard circulaire sur le lieu où il se trouvait au mot cave avant d’être aspiré par le regard de John. Il avait beau lutter, il y revenait toujours. Et cela avait le don de l’agacer au plus haut point. Sa mâchoire se serra d’autant plus que cette idée faisait son chemin dans son cerveau. -”Pourquoi tu n’as pas perdu la mémoire…” Cela lui aurait grandement facilité les choses. Il n’aurait pas eu à lui parler et il aurait pu faire semblant de ne pas le connaître. Et chacun aurait repris sa vie, comme si de rien n’était. Et cela aurait sûrement mieux valu, pour eux et pour le monde dans lequel ils se trouvaient actuellement. Cependant, Jack et John, n’avait jamais rien fait correctement ou avec intelligence. Pas quand ils étaient ensemble en tous les cas.

De toute façon, il n’avait aucune envie de rester pour parler de leurs souvenirs, ils n’avaient rien à se souvenir. Du moins, Jack voulait s’en convaincre et en convaincre le monde. Alors, il fit une chose qu’il n’aurait jamais faite en présence de l’autre agent du temps. Ex-agent du temps. Il tourna le dos à John. En temps normal, en entendant le coup de feu, il aurait continué sa route, ben oui, il était immortel, une balle n’aurait rien fait de bien méchant, sauf un trou dans sa chemise et il n’y tenait pas particulièrement. Cependant, aujourd’hui, il s’arrêta. Il avait senti l’odeur de la poudre et son regard clair remonta un peu pour voir l’impacte de la balle dans le mur devant lui. Il se tourna doucement vers John. -”Pourquoi un coup de semonce ? Je t’ai connu moins sympathique, tu n’as pas donné cette chance Owen et Tosh.” Il savait qu’il jouait avec le feu, mais c’était de Jack dont on parlait, il ne savait pas la fermer ou se faire discret.

Il fit un pas en avant après les mots de John, sur le visage, une étrange lueur dansant dans son regard céruléen. -”Parce que tu es assez con pour croire ne serait-ce qu’une seconde qu’il va y avoir une réconciliation ?” Il continua d’avancer, jusqu’à ce que le canon de John se touche son torse. Il resta quelques secondes sans bouger avant que son poing ne rencontre violemment le ventre de John et que son autre main lui attrapait le poignet pour le désarmé. -”Ce coup… C’est pour Tosh.” Il lui mit un coup de tête et le mit au sol avant de finir à califourchon sur lui, ayant récupéré son arme et la pointant sur son front. -”Et ça… C’est pour Owen.” Mais il ne tira pas… Il resta un moment sans bouger avant de laisser un grognement sortir de sa gorge et qu’il ne lance l’arme au loin. Mais cela ne voulait pas dire qu’il en avait terminé, son poing retrouva avec joie le nez de John, qu’il sentit se briser, avec une grande satisfaction sous son coup.

D'accord, il va sans dire qu'il me connait au moins autant que je le connais. Et si j'accepte la comparaison entre ma personne et un rat, ce n'est pas uniquement parce que ces êtres que l'on répugne sont pourtant d'une intelligence incroyable, surtout, effectivement, quand leur but est de survivre. Je crains malheureusement de devoir le contredire cependant, car sa version de l'histoire diffère de la mienne.

"Crois moi, je n'ai rien senti venir du tout. Et ce moment précis où tout a disparu, il est gravé dans ma mémoire. Comme un avertissement." Je ne dis pas que je compte en tenir compte, cela dit. "J'ai pensé à toi. Je me suis dit que si une personne pouvait survivre à cela, c'était toi. Qu'est-ce qui pourrait te tuer hein?"

J'omet de répondre à sa question suivante, ne souhaitant pas spécialement lui révéler que s'il s'était amené quelques mois en arrière, il aurait été exaucé. Néanmoins, si je me doutais que mon tir ne le ferait pas sursauter comme un cabri, je tique un peu quand il parvient tout de même à le faire se retourner vers moi. Ok, si il veut arracher le pansement, arrachons le pansement.

"Owen et Tosh? T'es resté là-dessus? Sur l'idée que c'est de ma faute si tes jouets sont cassés?!"

Comme si j'avais pu prévoir que Gray se servirait de moi pour ourdir sa vengeance contre son frère. Comme si j'avais pu prévoir qu'il comptait se venger de son frère, déjà. Moi qui escomptait en faire un cadeau à Jack, de son cher petit frère depuis longtemps disparu, je dois avouer que je ne l'avais pas vu venir. Et bien sur qu'il ne m'a pas écouté quand j'ai tenté de le mettre en garde. Il me connait, il sait que je mens comme je respire, mais il sait aussi voir au travers de mes mensonges. Il aurait du écouter mes mises en garde. Si il n'avait pas été tant aveuglé par Gray.

Oh il est fâché. Je dois relever le regard pour soutenir le sien à mesure qu'il se rapproche de moi, jusqu'à ce que le canon de mon arme repose contre son torse, alors qu'il repousse vertement ma proposition de réconciliations. Ouais, on verra. Il sait comment je fonctionne, je sais comment il fonctionne, et nous savons comment nous fonctionnons, ensemble.

Le coup dans le ventre, il me prend littéralement par surprise. C'est un peu lâche je trouve, ce genre d'attaque basse. Ok, il aurait pu frapper plus bas, et le fait qu'il ne l'ait pas fait me conforte dans l'idée qu'il n'a pas totalement rejeté ma proposition. Enfin, le coup de boule qu'il me colle après m'avoir désarmé finit de me mettre à terre, et le sol se fait dur pour mes vieux os, même si la vue d'un Jack Harkness en manteau militaire s'installant à califourchon sur moi me fait assez rapidement oublier ce désagrément. Le flingue posé sur mon front? Je le mettrais presque au défi de tirer. S'il le fait, il aura cassé un autre de ses jouets, et cette fois-ci, il sera le seul qu'il pourra blâmer. Le léger sourire qui me vient aux lèvres quand il finit par abandonner la lutte, balançant l'arme à l'autre bout de la pièce, est vite effacé par le coup de poing mémorable que je prends dans le nez. Putain ça, ça fait mal.

Sonné un instant, je prend le temps de tourner la tête sur le coté pour cracher le sang qui me descend dans la gorge, avant que mes mains ne viennent agripper le col de son manteau, pesant dessus avant de me relever assez pour lui rendre son coup de boule, en profitant pour retourner la situation et me retrouver en position dominante à cheval sur lui. L'empêchant de me faire le même coup en retour, parce que, pour être honnête, oui, j'ai mal, même si non, je ne le dirai pas de vive voix.

"Tu comptes m'écouter ou non? J'ai ma part de responsabilité dans leur mort, d'accord. Mais c'est pas moi qui ait appuyé sur la gâchette! Si t'as quelqu'un à blâmer, blâme Gray." Je fais une pause en repensant à la manière dont ce petit arrogant m'a doublé, moi qui suis pourtant suffisamment versé dans l'art de duper les autres pour penser que je l'aurai vu venir. "Il m'a eu. En beauté. L'orphelin perdu au milieu des monstres qui n'avait qu'une envie, retrouver son frère. Tu parles. Tu veux une confession de ma part? Le Capitaine John Hart a trouvé son maitre en matière de duplicité."

Je renifle difficilement avant de déglutir, avalant un peu plus de mon sang qui me tombe dans la gorge. Finissant par me redresser, m'asseyant totalement sur son bassin. Lui offrant un sourire de plus, ayant déjà oublié le pourquoi de la prise de tête.

"Ca me rappelle des souvenirs, toi et moi dans cette position. Tu veux vraiment pas parler réconciliation? Iento n'en saura rien, promis, juré."

Occupé à mimer une fermeture éclair dans l'air devant mon visage, je tique un peu tard sur son changement d'expression. Oh, de l'eau dans le gaz entre les tourtereaux?

"Crois-moi, je n'ai rien senti venir du tout. Et ce moment précis où tout a disparu, il est gravé dans ma mémoire. Comme un avertissement. J'ai pensé à toi. Je me suis dit que si une personne pouvait survivre à cela, c'était toi. Qu'est-ce qui pourrait te tuer hein ?" Il eut un début de sourire fier quand il entendit qu’on avait pensé à lui. S’il avait bien un défaut le Jack, c’était l’égo, cependant il réussit à le réprimer assez vite. Et bien sûr une réplique bien sentit sur le fait que John, n’avait rien “senti venir” lui brula la langue. Langue qu’il se mordit pour ne pas parler et ainsi éviter de donner l’espoir à John qu’il voulait papoter d’autre chose avec lui. -”Te parler trop longtemps, ça tuerait d'ennuis n’importe qui.” Encore une fois, il se garda bien de lui avouer pour sa mortalité toute jeune. Il n’avait vraiment pas envie de donner à John un moyen de levier. Il en avait déjà bien assez. Il se contenta donc de froncer le nez pour ne pas lui répondre et partit. Enfin, ça, c'était jusqu’à ce qu’une balle ne le frôle et qu’il ne trouve plus judicieux de faire face. Peut-être que John se poserait la question de savoir pourquoi il n’avait pas continué sa route. Mais la colère serait une excuse sûrement assez viable pour expliquer son demi-tour. Du moins, il l’espérait. -”Arrête… Ce n’était pas…” Oué, hein Jack… Qu’est-ce qu’ils étaient ? Non pas des jouets. Il s'était attaché à eux, malgré lui finalement, il avait fini par s’attacher à eux. Il serra les poings, puis arrivé assez près de John le désarma et le mit à terre. Le petit sourire de l’homme dans sa veste rouge l'agaça assez prodigieusement et il eut à son tour un petit sourire ravie quand il lui cassa le nez et qu’il vit ses jointures se tacher de rouge.  Il aurait bien continué, mais il le savait, Hart n’était pas du genre à rester les bras ballant pendant qu’on le frappait. Et il avait bien raison de penser ça.

Il ne fallut pas longtemps pour que les positions soient échangées. Ok, il n’arriva pas à arrêté son esprit et des pensées beaucoup moins belliqueuses affluèrent et même quelques souvenirs se dessinèrent derrière ses yeux d’azure. Et merde tiens. Heureusement, on ne le laissa pas pensé et la voix de John résonna de nouveau. "Tu comptes m'écouter ou non? J'ai ma part de responsabilité dans leur mort, d'accord. Mais c'est pas moi qui ait appuyé sur la gâchette! Si t'as quelqu'un à blâmer, blâme Gray. Il m'a eu. En beauté. L'orphelin perdu au milieu des monstres qui n'avait qu'une envie, retrouver son frère. Tu parles. Tu veux une confession de ma part? Le Capitaine John Hart a trouvé son maitre en matière de duplicité." Honnêtement ? Non, il n’avait pas envie de l’écouter, mais vu la position, il n’avait pas vraiment le choix. Position qui aurait pu être très agréable. -”Ferme là, tu veux. Tu cherches juste une excuse pour te dédouaner de tes acts. Mais je vais te donner le résultat de mon amère expérience… Tu n’y arrivera pas.” Et Jack, avait pardonné à son frère et il n’avait pas envie de revenir là dessus, d’ouvrir de nouveau cette blessure. Il en avait bien assez encore à vif. -“Laisses moi rire. Je suis sûr que tu t’es laissé avoir parce que tu en avais envie, tu avais juste besoin d’une bonne raison ou d’une excuse si je venais à t’attraper...”

Et John assoit complétement sur lui, il sent le poids de son corps sur ses hanches et ses cuisses trouvent leurs places sans même qu’ils aient à bouger l’un ou l’autre. Comme quoi, son corps n’avait pas oublié la forme de celui de Hart. Il ragea un peu. Parfois être lui, c’était compliqué ! Mais la suite des mots de John eurent sûrement l’effet contraire à ce que l’ex-agent du temps voulait. Il ne l’avait pas prononcé correctement, une manière de piquer Jack ou seulement parce qu’il n’avait jamais cherché à connaître le nom de Ianto. Mais l’ancien chef de Torchwood Cardiff se figea. Son visage se ferma, son regard bleu prit une teinte grisâtre et une douleur inouïe passa dedans. Douleur qu’il ressentit jusqu’au plus profond de ses os. -“Je... T’interdit...De...Parler...De... Ianto.” Il avait siffler ses mots à travers ses dents comme si c’était douloureux rien que de les prononcer et ça l’était. Il ne voulait pas que John salisse le sacrifice de Ianto. Il ne voulait pas que John salisse Ianto tout court. Il ne voulait pas penser à Ianto.  Il tenta de renverser John en donnant un coup de bassin. Colère, tristesse, désespoir se mélangeaient et sûrement que Hart saurait voir tout ça. Il avait toujours su.

Je hausse les sourcils, surpris qu'il arrive encore à croire que mes paroles n'ont pour but que de me dédouaner de mes actes. Il me connait pourtant bien mieux que ça.

"On sait aussi bien toi que moi que je ne me suis jamais étouffé avec la culpabilité. Pourquoi voudrais-je me dédouaner de quoi que ce soit? Surtout que ça remonte à une éternité cette histoire."

C'est fou ce que ce type peut trouver comme explications à deux ronds pour justifier une situation. Peut-être que je me suis laissé avoir, oui, mais si ce devait être une excuse pour quelque chose, ça aurait été pour le revoir sans attendre dix décennies. Peut-être parce que s'il a probablement l'éternité devant lui, ce n'est guère mon cas, et j'ai pris conscience que des décennies, j'en ai plus cinquante à vivre. Peut-être que j'avais réellement envie de me poser, d'arrêter de courir sans arrêt après le frisson et le danger, et que cette brève mais intense aventure que j'ai partagé avec sa petite équipe m'a paru assez intéressante pour y retourner. Et puis ils étaient mignons, ses petits amis, je suis sur qu'à défaut de me rabibocher avec le grand patron, j'aurai pu trouver à m'amuser avec le reste de l'équipe. Mais je m'égare. Tout ça pour dire que je lui ai offert mes condoléances, qu'il m'a demandé de sortir de sa vie une bonne fois pour toutes, et que j'ai passé l'éponge sur le sujet. Je ne vois vraiment pas pourquoi je tenterai de défendre ma cause sur quelque chose dont je me fiche royalement.

Soyons honnêtes, s'il espère me voir rester sage jusqu'à la fin de cette conversation, il va vraiment falloir que nous changions de position. A moins qu'il ne souhaite pas que nous restions sages, malgré ses belles paroles sur la haine viscérale que je lui inspire. La haine, l'amour, c'est subjectif toutes ces notions. Ou pas. Parce qu'il me parait évident que j'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas. Et que ça à voir avec son cher et tendre. Si l'oiseau s'est envolé? Aucun risque, vous les avez regardés? Que Jack le vire, je comprendrais. Que l'autre ne s'accroche pas à lui comme une tique sur un chien, non. Ce qui ne laisse qu'une seule vérité possible. Jack a cassé un autre de ses jouets. Et c'est assez récent pour qu'il n'ait pas encore accepté les choses. Ce que ça doit être fatiguant de s'attacher à tous les chatons perdus qu'il trouve sur sa route, sérieusement.

Quand il essaye de me virer, j'accède à sa demande en me relevant, finissant par tendre une main vers lui pour lui proposer mon aide. Même s'il est certain qu'il n'acceptera pas l'assistance que je lui offre.
"Une autre perte que tu comptes me mettre sur le dos, j'imagine?"
Devant son refus manifeste de se saisir de ma main, je ne lui laisse guère le choix, finissant par le remettre sur pieds sans ménagement, toute pensée salace momentanément évanouie. Fut une époque où il savait pouvoir se confier à moi, même si je n'ai pas toujours été celui qui avait les meilleures réponses à lui apporter, comme avec cette histoire de souvenirs volés par nos employeurs.
"Je suis désolé pour toi. Sincèrement."
Même si je pense tout aussi sincèrement qu'il y avait assez peu de chances que ça tienne longtemps, ces deux-là. Parce que son petit anglais était bien trop gentil pour lui. Si Jack avait besoin de quelqu'un de gentil, ça se saurait.
"Et la quatrième? Gwen Cooper. Elle, c'était ton genre, y a pas à dire."
Et le mien? Disons que je n'aurai pas été contre l'idée si l'occasion s'était présentée. Mais Jack n'a pas eu besoin de mots pour me faire comprendre qu'elle était chasse gardée. J'ai assez peu de principes, mais ne pas piquer dans l'assiette de l'autre, c'est un peu une règle tacite entre nous.

Malgré lui, Jack eut un sourire. -”Parce que tu mourrais d’envie de me revoir et que tu savais que tant que je t’en voudrais pour mon équipe, je mettrais des années lumières entre toi et moi. Alors, tu as cherché à te construire une jolie histoire, à y croire toi-même pour tenter de me la faire avaler… Mais je n’y crois pas. Personne ne peut mener John Hart par le nez. Personne, pas même moi.” Il pouvait parfois amener John à penser autrement, mais au final Hart ferait ce qu’il voulait faire et pas autrement. Alors, il n’était pas sûr que son frère ait pu réellement avoir John à ce point. Même si au fond de lui, il savait qu’une part de vérité se cachait dans les mots de son ex… Quelque chose. -”Une éternité ? Tu ne sais pas ce que c’est, une éternité… Tu te souviens quand tu m’as enterré vivant ? Oui, là, c'était une éternité…” Oui, il y avait ça aussi, il n’était pas près de l'oublier. John et lui avaient toujours étaient friands de préliminaires parfois un peu étranges, mais être enterré vivant, il n’avait pas du tout apprécié. Et c’était un euphémisme de dire qu’il n’avait pas aimé. Cette situation lui avait laissé un sale goût dans la bouche… Et le premier qui dit un goût de terre se prend le pied de Harkness si profondément dans le fondement que celui qui arrivera à le lui retirer se fera appeler le roi Arthur.

Mais voilà que Jack commençait, je dis bien, commençait à être dans un autre état de penser quand John dit le prénom de Ianto. Tout changea chez Jack. Aussi vite que le temps en haute mer. Son regard passa d’un calme relativement plat à une tempête de douleur, de colère et de dégoût, presque tout retourné contre lui. Il aurait dû… Dire des choses à Ianto. Il aurait dû… Les choses auraient été différentes avec lui, parce qu’il savait qu’il était immortel, il n’aurait pas eu besoin de fuir comme avec sa femme, comme avec ses enfants. Mais il avait dû le regarder mourir, il avait dû se réveiller encore une fois seul au monde. La douleur, la culpabilité surtout. Alors quand John demanda s'il allait lui mettre la mort de Ianto sur le dos, Jack évita son regard. C'était de sa faute. De sa faute uniquement.  Il refusa sa main, mais l'homme à la veste rouge ne lui demanda pas son avis et le força à se mettre sur ses pieds.

-”Elle est mariée et enceinte. Du moins je crois qu'elle l'était quand je suis partie.” Mais avec l'effondrement des univers, qui pouvait dire ce qu'il était advenu de Gwen et de Rhys?  Jack plongea ses mains dans ses poches. Semblant chercher quelque chose. Il n'arriva pas à mettre la main dessus et tourna de nouveau le dos à John. Il était épuisé, véritablement épuisé. Ses épaules s'affaissèrent un peu. En colère. Il ferma les yeux quelques secondes et des mots qu'il s'était pourtant juré de ne pas dire sortir de ses lèvres.

-”J'ai besoin d'un verre.” Ou de plusieurs. Plusieurs verres oui. Et il savait que John le connaissait bien. Trop bien et qu'il ne le jugerait pas. Ni sur le sang qu'il avait sur les mains. Ni sur ses décisions. Ni sur son envie de boire son poids en vodka. C'était la différence entre John et toutes les autres personnes qui avaient partagé sa vie. Ils ou elles avaient toutes chercher à le changer. John lui, l'avait pris comme il était vraiment. -”Ce n'est pas une offre de paix. Seulement une trêve momentanée. J'aurai tout le temps de finir ce que j'ai commencé plus tard. Ce n'est pas comme si tu pouvais aller bien loin.”

Comme quoi, il y a toujours un précédent dans l'histoire. Même si ça ne concerne qu'une personne capable de me flouer. Je l'admet, en général, c'est moi qui embobine mon monde, même si j'ai tendance à penser que ça n'a jamais vraiment bien marché avec Jack. J'sais pas, il doit trop bien me connaitre pour que ça fonctionne. La preuve en images, même quand je suis sérieux sur le fait que Gray m'ait eu en beauté, il refuse d'y croire. Parce que son frère depuis longtemps disparu a plus de crédits à ses yeux que moi? Si ça me préoccupait.

"Touché. En même temps, sans ma balise, t'y serais certainement encore.

Je pourrai argumenter de nouveau que l'idée de l'enterrer vivant n'était pas la mienne mais celle de son frère. Et que j'ai déjà risqué ma vie à balancer cette bague dans le trou avec lui. Sans compter que si j'avais voulu le piéger pour l'éternité, de ma propre initiative, je ne me serai pas cassé le dos à creuser une tombe de quatre ou cinq mètres de profondeur puis à reboucher la dite tombe de mes propres mains. J'aurai chargé Gray de le faire. Ou je me serai contenté de l'enfermer dans un cercueil et balancer le dit cercueil au fond de l'océan. Moins d'efforts à fournir.

"Enfin, entre nous Gueule d'Ange. Penser que j'ai suivi ton frère, creusé ta propre tombe et risqué ma vie avec une bombe moléculaire accrochée au poignet, tout ça pour te revoir... t'as peut-être le plus beau cul de l'univers, mais j'suis pas désespéré à ce point."

Ou peut-être que si? Nan. Y a des millions d'autres occasions de tirer un coup sur cette planète, même sans compter le voyage temporel. J'ai pas consacré ma vie entière à la poursuite de ce type. J'y cours juste après quand on se croise. Totalement différent. Cardiff? D'accord, j'avais eu un tuyau.

Bref, j'évite soigneusement d'insister sur le sujet Iento, voyant que ce n'est vraiment pas le sujet idéal pour améliorer les perceptions de Jack à mon sujet. Je dévie donc sur un autre sujet tout proche mais pas trop quand même, et pour lequel je pense n'être fautif de rien, hormis d'avoir occupé un peu les rêves de la dame. Gwen Cooper.

"Enceinte tu dis? Le fiancé ou toi? J'te rappelle que tu m'as assez explicitement montré qu'elle était chasse gardée."

Les mains fourrées dans les poches de son manteau, voilà qu'il me tourne le dos de nouveau, son attitude me laissant cependant davantage perplexe que vexé comme j'ai pu l'être au départ. J'hésite un instant sur l'endroit où poser le bleu de mes yeux avant que sa voix ne s'élève à nouveau entre nous, à peu près au moment où je glisse la main sous mon nez pour essuyer une partie du sang qui me tombe dans la bouche.

"J'ai cru que tu le proposerais jamais. Amènes-toi, j'ai des bouteilles derrière."

La paix? Entre nous, c'est superflu. C'est dans la guerre qu'on s'est toujours le plus rapprochés, lui et moi. La paix c'est calme, c'est ennuyeux, et j'ai depuis longtemps compris que Jack Harkness n'aime pas le calme et l'ennui.

"Parlant d'aller loin. Toi qui t'y connais autant que moi en matière de bracelets de l'Agence, tu saurais arranger le mien? Le voyage spatio-temporel est bloqué, et crois-moi que c'est pas le manque d'avoir été fouiner dans les sous programmes."

Pourquoi m'aiderait-il? Il l'a dit une fois, plus je suis loin, mieux il se porte. S'il me répare le bracelet, il a des chances d'espérer que je mette les voiles non? Est-ce que je mettrais vraiment les voiles? S'il le demande avec assez de conviction, peut-être.