Étoiles et chapelet de saucisses - Rampa & Perceval

Je ne suis pas très à l’aise dehors la nuit. Je vais pas le cacher, j’ai un peu peur de tout ce qui rôde autour de moi, des bêtes sauvages et tout ce qui s’en suit. Bon, je ne suis pas au niveau de Bohort qui a même peur des lapins adultes et des faisans, mais c’est vrai que je ne fais pas le malin non plus. De toute façon je me balade jamais sans un chapelet de saucisses. Ils n’ont qu’à voir ma technique avec ! Un vrai ninja.

Toujours est-il que je ne sors généralement pas la nuit. Mais cette fois, j’ai vu un ciel nocturne magnifique à travers la fenêtre de mon appartement et je commençais à avoir mal au cou et au dos à force de me pencher par-dessus la rambarde. Du coup, me voilà en bas de chez moi, au milieu de la nuit. Armé de mon quatre-heure en guise de nunchaku, je vadrouille dans la rue, sans m’aventurer trop loin. Je sais qu’un peu plus loin il y a un banc sur lequel je vais pouvoir contempler le ciel et en prendre tout mon saoul.

Je finis même par trottiner pour y arriver plus vite, avec la sensation étrange que quelqu’un me suit à la trace. Sans doute une paranoïa mal placée. Qui voudrait me faire du mal ? Et surtout, qui voudrait affronter un chevalier tel que moi ? Il ne sait pas à qui s’attendre.

Ne voyant finalement personne aux alentours, je m’assois sur le banc libre et contemple avec envie la voûte céleste parsemée d’étoiles. J’aimerais tellement aller là-haut, dans l’espace. Je crois que je donnerai tout. Même mon chapelet de saucisses.

Azi, Azi, Azi, sérieux l'angelot, va falloir combien d'apocalypses avortées pour te sortir de ma tête. J'suis peut-être plus tout à fait un démon, encore moins un ange, mais j'ai pas gagné en facultés de sommeil pour autant... justement parce que je suis pas foutu de me sortir ce maudit ange de la cervelle. Vous me direz qu'après 6000 ans à se croiser, se recroiser, se chamailler, se mettre des bâtons dans les roues et s'entraider, bref, savoir que quoi qu'on fasse, l'autre va systématiquement se trouver dans les parages, ça avait quelque chose de rassurant. Vous me direz, quelque part, c'est ma faute, si la routine est brisée, parce que c'est moi qui ait décidé de dire merde à l'univers et d'accepter la proposition du TVA de les rejoindre, mais en fait, tout ça, c'est la faute d'Aziraphale et de sa naïveté légendaire. Suffit que le Métatron lui offre un siège au Paradis et le pardon pour tous ses écarts de conduite (enfin, "écarts de conduite du point de vue d'un ange, ça veut dire traverser un carrefour au feu orange donc...), pour qu'il saute à pieds joints sur l'occasion et oublie totalement qu'on était quand même bien mieux entre nous sans s'emmerder avec les petits problèmes du ciel et de l'enfer.

Bref, j'en ai marre de ressasser à propos de ce maudit ange. Et pourtant, c'est sur un banc public que je m'en vais m'installer, sans vraiment me préoccuper de savoir si la place est libre ou pas. Comme à l'époque de nos rendez-vous incognitos loin des regards de nos camps respectifs. C'est en regardant par dessus mes lunettes de soleil - oui je sais, il fait nuit noire, merci - que je remarque les cheveux quasi blancs de l'homme assis à l'autre bout du banc. J'ai presque un sursaut avant de capter que ça n'a rien à voir avec mon ange.

"Vous non plus vous arrivez pas à fermer l'œil? C'est quoi vot poison? Une femme, un homme, la météo?"